mardi 7 février 2012

Premières impressions

Voici déjà un mois que j'ai posé le pied sur le sol tchadien.

Et déjà beaucoup de kilomètres parcourus (pour la majeure partie en avion): de N'Djaména à Abéché dans l'est du pays, et d'Abéché vers Iriba d'abord et Guéréda, deux petites villes au Nord-est d'Abéché, aux environs desquelles se trouvent des camps de réfugiés soudanais du Darfour où travaille le JRS dans le domaine de l'éducation. 

Merci au UNHCR pour ces cartes qui vous permettront de mieux saisir la géographie des camps de réfugiés dans l'est du Tchad.

A tout seigneur, tout honneur. C'est aux réfugiés, aux impressions de mon premier contact avec eux au cours de ces derniers jours que je voudrais consacrer le premier message de ce blog. J'ai visité les camps de Iridimi, Touloum, Am Nabak, Kounoungo et Milé.


La première chose qui m’a frappé, c’est l’environnement dans lequel sont installés les camps de réfugiés. En voici un aperçu vu du ciel.








 
Et maintenant au ras du sol... 


Non, non, ce ne sont pas les pyramides de Kéhops, Khéphren et Mykérinos.

Cela ressemble peut-être à une belle plage de sable fin mais la mer la plus proche doit être à au moins 2000 kilomètres. Nous sommes au camp de Touloum dans la région d’Iriba, où vivent plus de 20.000 réfugiés.  Lorsque j’ai visité les camps, je me suis dit plusieurs fois : « Quel pays ! ». Des horizons immenses, des étendues de sable et de rochers à perte de vue, parsemées ici et là de quelques arbres déplumés, et dont les seules dénivellations sont les rives de multiples oueds qui font parfois plusieurs dizaines de mètres de large.  C’est très  beau mais c’est tellement aride que je ne peux m’empêcher de me demander comment on peut vivre une vie entière ici. En tous cas, cela vous forge un tempérament de survivant.

Comme souvent dans les camps de réfugiés en Afrique, j’ai été  accueilli par la curiosité des enfants et leur cri traditionnel : « le blanc ! le blanc ! » (Ici, on dit « Nazara » … une référence à Jésus de Nazareth).
Les enfants ne manquent pas. Les moins de 18 ans forment la grande majorité des camps (autour de 60% !).  Les plus jeunes sont pleins de vie et d’énergie. Ils rient en me saluant, même si je suis parfois effrayant pour les plus petits d’entre eux. 




Les garçons adorent prendre la pause et se bousculent devant l’objectif …
... ce qui n’est pas le cas des filles beaucoup plus pudiques. En tous cas à partir de 12 ans.


Dans les camps, le JRS travaille principalement pour les enfants : soutien à l’éducation primaire et préscolaire, et dans quelques camps, développement d’écoles secondaires, mais aussi promotion d’activités parascolaires (informatique, alphabétisation, anglais, musique, théâtre, journalisme, volley-ball …).
Les défis ne manquent pas : certaines de salles de classe sont construites avec des matériaux durables mais d’autres sont faites de bois, de bambous, de bâches plastiques et de paille. Des matériaux qui avec le climat extrême que connaît cette partie du Tchad et les termites rongeuses, se détériorent rapidement. Lors de mes visites, les directeurs d’école et enseignants ne se sont pas fait prier pour me faire constater les dégâts et les besoins …



Mais le cœur de l’action du JRS, c’est la formation et la supervision des enseignants. Un travail patient qui vise à aider chaque enseignant (dont certains n’ont pas terminé le cursus primaire) à améliorer sa manière de donner cours. C’est beau de voir comment les agents de suivi du JRS ont développé des relations de confiance et d’appréciation mutuelle avec les directeurs d’école et les enseignants. Ici, la directrice d'une des écoles primaires du camp d'Am Nabak nous invite à visiter les classes.

Voici, à droite, Djubara, un membre de l'équipe du JRS, en grande conversation avec un enseignant de l'école Almeiria au camp d'Am Nabak.










Et là, avec Ahmed et le directeur de l’école centrale d’Am Nabak, nous admirons la pépinière qui « Inch’Allah » devrait venir donner un peu d’ombre aux élèves pendant la récréation.
Vous remarquerez que malgré la latitude et le soleil absolu, je supporte facilement une petite laine. Il faut dire que la région d’Iriba et Guéréda où se trouvent les camps que j’ai visités au cours de mes deux premières semaines dans l’est du Tchad est en altitude (aux alentours des 1000m). Je suis aussi arrivé à une bonne période de l’année où la température en journée est clémente dans tout le pays et à Iriba et Guéréda, le vent du Nord souffle. On m’avait dit que j’aurais froid là-bas et cela m’avait fait sourire. Mais je dois bien avouer qu’après ma première nuit à Iriba, j’ai demandé une deuxième couverture pour la nuit suivante. 

Quelques enseignants d'une des 10 écoles primaires du camp d'Am Nabak. la directrice est en jaune. Tout à droite, Michel, volontaire burundais du JRS, directeur du projet d'amélioration de la qualité de l'éducation.
Aussi bien chez les Tchadiens que chez les réfugiés soudanais, l’hospitalité n’est pas un vain mot. On est toujours prêts à vous recevoir et à vous offrir le thé. Les salutations ne sont pas vraiment laconiques : on prend le temps de se souhaiter la paix, la santé, on demande comment va la famille, si tout va bien … Et le nom de Dieu – « Allah » - y résonne sans cesse.
Et il ne faut surtout pas négliger de se présenter. Les ardoises de l’UNICEF sont parfois utiles aussi pour cela !
Lorsque nous avons visité le camp d’Am Nabak, nous avons appris le décès soudain deux jours plus tôt d’une des élèves d’une école du camp. Nous sommes allés rendre une visite de condoléances à l’école où s’étaient rassemblés la famille endeuillée et les amis et voisins. Immédiatement on nous a reçus à la salle des professeurs ; on nous a lavé les mains avant de nous inviter à partager le repas de deuil. C’était très touchant.


Malheureusement on peut rarement s’attarder au camp car les allées et venues entre Iriba et Guéréda où sont logées les agences humanitaires et les camps de réfugiés (une distance qui peut aller jusqu’à 45 km, soit 1 heure et demie de route) se font en convoi, avec un escorte du DIS (Détachement Intégré de Sécurité), une section de l’armée tchadienne chargée de la sécurité dans les camps. A 15 heures, en général, c’est déjà l’heure du départ.

C’est aussi l’heure de vous laisser avec mes premières impressions. J’espère pouvoir vous en donner d’autres sans trop tarder. 


5 commentaires:

  1. Merci pour ce billet passionnant qui nous permet de situer et de suivre ce beau projet de près. Merci aussi pour les splendides photos illustrant si bien l'enthousiasme de Nazara... A très bientôt !

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  2. Chouette d'avoir tes nouvelles venant d'un pays que je connais moins bien à tout point de vue.
    Bon courage pour ta mission et au plaisir de lire d'autres de tes aventures :-)

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  3. Excellente idée ce blog car on a un peu de mal à te suivre monsieur globe-trotter. Au moins ainsi, nous revoilà connectés! Chouettes commentaires! Au plaisir de te lire... Myriam Neirynck

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  4. Merci de partager ce carnet de mission tout ensoleillé qui nous permet de te suivre et d'être en prière pour tous les enseignants, les enfants, les réfugiés, les "JRS" rencontrés. Bonne continuation! A bientôt! Emilie & Benoît

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  5. Bonjour,

    je m'appelle Lola Smets, et je suis étudiante en master en Action Humanitaire à l'Université Catholique de Louvain-la-Neuve. Dans le cadre d'un projet (fictif), nous devons élaborer un projet humanitaire. Notre projet tend à diminuer la mortalité infantile, liée à la malnutrition et aux maladies diarrhéiques.
    Nous avons décidé de nous cibler sur le camp de Amnabak au Chad. En tombant sur cet article, je me rends compte que vous y avez séjourné.
    Serait-il possible d'avoir plus d'informations sur le camp et/ou un entretien ?

    Je suis à votre disposition via mon adresse mail : smets.lola@gmail.com

    Votre aide nous serait réellement précieuse.

    D'avance merci,
    Lola Smets

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